Dans l’extrait de cette séance de coaching, nous verrons comment coacher un client qui se préoccupe de justifier sa légitimité. Cela arrive souvent que des managers (et des coachs !) aient ce complexe de ne pas se sentir légitime.
A Retenir
- Le syndrome de l’imposteur affecte la légitimité en générant des doutes sur ses capacités.
- Le coaching encourage l’orientation vers des solutions pour éviter les pièges du doute.
- La supervision des coachs peut prévenir leur propre sentiment d’imposture.
- Concentration sur la création de valeur plutôt que la justification de soi pour surmonter le doute.
- Un manager solide en confiance en soi réduit les impacts du syndrome de l’imposteur.
Nota : Qu’est-ce que la légitimité ?
Selon wikipedia : Le concept de légitimité apparaît lorsqu’une personne ayant une capacité d’action lie celle-ci à un élément de droit, ce que traduit la formule « je suis légitime à faire ceci parce que j’en ai reçu le droit »… ou que c’est juste à ses yeux, donc d’un point de vue éthique.
En pratique, dans le management, on parle plutôt de légitimité technique, pour parler du niveau de compétence d’une personne à exercer sa fonction, plutôt que de parler de son droit légal (qui n’est généralement pas remis en question dans une organisation professionnelle).
A Retenir
- Dans cette séance de coaching, le client se sent challengé sur sa légitimité par un membre de son équipe. Il souhaite résoudre cette situation conflictuelle et sollicite son coach pour réfléchir aux meilleures stratégies pour en sortir par le haut.
- Les actions que retiendra le client :
- Se concentrer sur les priorités plutôt que sur la personne perturbatrice.
- Utiliser la situation pour s’affirmer et progresser en tant que manager.
- Recadrer sans affect personnels pour maintenir une communication factuelle.
- Orienter vers des solutions plutôt que l’analyse des problèmes.
- La supervision de coach peut être d’une grande utilité, pour vraiment aider les clients victimes du syndrome de l’imposteur, car celui-ci est communicatif. Et le coach peut se retrouver à douter lui-même de ses compétences à aider son client, venant ainsi à douter lui aussi de sa propre légitimité…
Extrait de séance de coaching sur la légitimité du manager
Client : » J’ai une difficulté avec une personne clé de mon équipe, qui conteste visiblement ma légitimité. Apparemment elle m’attend sur un expertise métier, ne voit pas quelle est ma contribution managériale. Elle ne reconnaît probablement pas la valeur que je crée pour l’équipe. J’ai déjà dû la recadrer plusieurs fois. Mais cette fois, elle a dépassé les bornes : j’en fais une affaire personnelle, parce qu’elle conteste ma légitimité publiquement… »
Coach : « Apparemment cette personne est très douée pour attirer votre attention… De quelle priorité est-ce qu’elle vous détourne, sur laquelle vous pourriez vous concentrer plutôt que de vous focaliser sur elle ? »
Client : « C’est vrai qu’elle me tourmente et m’empêche de me consacrer pleinement à ceux qui jouent le jeu et méritent mon attention. Je ferais peut-être mieux de me focaliser sur eux plutôt… » … (suite de la séance)
Coach : « Si je peux maintenant vous proposer de prendre encore un peu plus de hauteur par rapport à cette situation : qu’est-ce qu’elle vous enseigne de bien utile pour vous, et fait finalement progresser votre management ? »
Client : « Je suis obligée de m’affirmer davantage, parce qu’elle me challenge sur ma légitimité. Mais ce n’est pas la première fois que je vis cela, parce que j’ai toujours un peu un doute sur ce point, évidemment. Sinon cela ne me toucherait pas… En fait, elle me stimule à travailler sur moi-même… »
Coach : « Hmm, oui, et quoi d’autre ? » Client : « Elle m’oblige à être très attentive à chaque chose que je dis, pour être légitime et éviter d’être contre-dite. en contre partie, cette hyper vigilance me détourne de ce qui est essentiel, et que du coup je laisse un peu de côté… »
Coach : » Ah oui ? De quoi s’agit-il ? »
Client : » Mettre en place une bonne cohésion au sein de l’équipe, m’assurer de la cohérence de nos actions, accompagner chacun sur son développement, etc…
Coach : « Comment vous y prendriez-vous pour adresser ces priorités, si vous décidiez de ne plus vous laisser disperser par cette personne, et si vous ne vous préoccupiez pas de justifier de votre légitimité ? »
Recadrer sans rentrer dans le jeu de la justification
(Pendant une vingtaine de minutes, le client élabore son plan de cohésion d’équipe, de mise en cohérence des actions, et de développement de ses collaborateurs… Puis, il revient sur le cas de la personne qui la tourmente :
Client : « De toutes façons, je vais devoir recadrer cette personne, puisque elle me cherche. Mais, je le ferai différemment, parce que j’ai maintenant les moyens de ne plus en faire une affaire personnelle. Ce sera simplement un rappel des règles… Et puis, je lui demanderai ce qui ne va pas, quel est le problème qu’elle cherche finalement à me signaler au travers de ses râleries… «
Coach : « Oui en effet, vous serez un peu plus distancié, maintenant que vous avez repéré le jeu qu’elle voudrait jouer avec vous en vous attrapant par votre soi-disant manque de légitimité…
Et, puisque vous parliez de recadrage à l’instant, puis-je me permettre de vous en propose un à mon tour : « Comment pourriez-vous orienter cette personne sur des solutions, plutôt que de l’interroger sur un problème qu’elle aurait… ? »
Client : » OK, je ne lui demanderais pas ce qui ne va pas, ni quel problème elle cherche à m’indiquer sous le problème qu’elle me pose, mais je l’interrogerais plutôt sur les solutions qu’elle peut mettre en place pour être elle-même plus productive pour l’équipe… (suite de cette réflexion de la part du client et fin de séance)
La quête de légitimité est sans fin
Dans cet extrait de séance de coaching sur la justification de la légitimité, on voit bien que la légitimité (qui est un thème qui revient souvent chez les managers) n’est qu’un « jeu », un faux problème, dans lequel le client est pris, et pour lequel il n’y a pas d’autre solution que de ne plus y entrer, en ne répondant pas aux amorces de jeu, tendues par les personnes qui contestent sa légitimité.
Il s’en trouvera toujours qui douteront (à commencer par soi-même parfois) et il est plus intéressant de créer de la valeur activement, plutôt que de perdre du temps à douter de soi (ce qui est contre-productif, évidemment).
Pour ne plus douter de soi, il faut cesser de se préoccuper de soi et se concentrer sur la création de valeur par l’action juste et efficace.
Refuser de se justifier
Bien sûr, il conviendra peut-être que le manager recadre la personne en question, mais dans une posture qui ne soit pas affectée par un complexe quelconque, ni une question d’ego.
Une fois la situation décontaminée de ses affects, la communication sera certainement plus simple et plus factuelle.
Par ailleurs, on voit aussi comment, même sans se justifier, aller voir la personne pour lui demander ce qui ne va pas, serait encore une autre façon de retomber dans le jeu. Cela montrerait à cette personne qu’en se plaignant, en levant les yeux au ciel quand son manager lui parle, en faisant des remarques en réunion, elle réussit à attirer son attention, elle obtient de l’intérêt et peut l’enfoncer avec elle dans son problème favori…
A quoi cela lui sert-il ?
- A rien bien sûr, sauf à éviter de se concentrer sur ce qui créerait de la valeur pour elle et les autres !
C’est stupide ?
- Bien sûr, mais c’est tout de même un classique des comportements répétitifs destructeurs.
Refuser de rentrer dans l’espace problème
Au contraire le manager gagnerait probablement à ne pas rentrer dans le « problème » : établir un contact chaleureux mais ferme, résolument orienté vers les solutions, évitant tout particulièrement d’aller « analyser ensemble ce qui ne va pas… » (sous peine sinon de tomber dans le piège tendu, et de rejoindre la personne dans l’impuissance à résoudre un problème évidemment sans solution ! Il n’y aurait alors plus qu’à faire encore plus de ce qui ne fonctionne déjà pas, jusqu’à une crise relationnelle qui obligera à des extrémités désagréables pour tous).
Le coach s’emploie tout de suite à bousculer le cadre de référence de son client, en le sortant des rails qu’il propose pour cette séance, et qui justement ne vont nulle part (sauf peut-être in fine… à contester la légitimité du coach, par reflet systémique !)
Le sentiment de légitimité repose sur la confiance en soi
Un manager qui manque de confiance en soi aura probablement ce problème de légitimité, à ses propres yeux d’abord. Il craindra donc probablement que son prétendu manque de légitimité le trahisse, en se voyant de l’extérieur. Il sera ainsi embarrassé dans l’action par de telles pensées parasites, qu’il conviendra de nettoyer en recardant les croyances limitantes, qui opèrent un véritable auto-sabotage sur l’estime de soi.
Si le problème est ponctuel, lié à des circonstances particulières, comme une prise de poste par exemple, le coaching aura à coeur de lister les croyances négatives qui font craindre au client de ne pas être à la hauteur. Et puis, il faudra les recadrer, une par une.
Le feed-back positif et chaleureux du coach sera également d’une grande aide, de même que de proposer de lister ses fiertés et réussites antérieures.
Cependant, ces techniques classiques ne suffiront probablement pas, si ce problème de légitimité est profondément ancré dans la vie toute entière de ce client, et relève de ce que l’on appelle le syndrome de l’imposteur.
Syndrome de l’imposteur
Le complexe de légitimité est généralement ce qu’on appelle le syndrome de l’imposteur » :
- Avoir l’impression de ne pas être à sa place
- Avoir l’impression de ne pas mériter sa place
- Se dire qu’on n’est pas à la hauteur des fonctions qu’on occupe
- Penser qu’il n’est pas juste ou équitable que ces fonctions nous reviennent
D’après France Travail, Le syndrome de l’imposteur alimente un sentiment d’insécurité et peut déboucher sur un état de stress ou d’angoisse. Il peut même nous conduire à nous auto-saboter, lorsque nous choisissons de ne pas faire quelque chose, de ne pas prendre de risques ou de nous mettre en situation d’échec.
Ce cas est possiblement assez lourd, occasionne de graves souffrances chez les personnes qui en sont atteints, et peut mettre à mal la confiance en soi des coachs non avertis, qui finiraient par s’épuiser sans pouvoir véritablement sortir leur client de leur mal-être constitutif de leur personnalité.
D’où vient le syndrome de l’imposteur ?
À l’origine, le concept du syndrome de l’imposteur a été développé en 1978 par deux psychologues américaines, Pauline Rose Clance et Suzanne Imes. Ces dernières l’ont défini comme la sensation désagréable de douter en permanence de ses capacités, de ne pas se sentir légitime dans son statut, et de ne pas réussir à s’approprier ses succès.
Ces personnes rejettent donc plus ou moins systématiquement le mérite lié à leur travail et attribuent le succès de leurs entreprises à des éléments qui leur sont extérieurs (la chance, leurs relations, des circonstances particulières). Dans certains cas, la personne atteinte peut aller jusqu’à se percevoir comme une sorte de dupeur-né qui abuse ses collègues, ses amis, ses supérieurs et s’attendre à être démasquée d’un jour à l’autre.
Le coaching peut évidemment aider nos clients à retrouver plus d’estime de soi et se sentir mieux unifié entre leurs sous-personnalités parfois discordantes (voir à ce propos notre article sur le sentiment de culpabilité).
Supervision de coachs pour ne pas succomber soi-même au syndrome de l’imposteur
Quand un client doute de ses capacités, sa première tendance, plutôt valorisante pour le coach, sera de déposer ses doutes auprès de nous, supposant que nous sommes une référence légitime et capable de l’aider dans sa difficulté.
Puis, il n’est pas rare que par écho systémique, le coach en vienne lui aussi à doute de ses propres capacités à aider ce client. Par exemple, quand le client ne parvient finalement pas, après quelques essais, à se sentir plus légitime, malgré des prises de conscience et des plans d’action pourtant mis en oeuvre avec succès. Dans ces cas-là, c’est que le « défaut système », la « défaillance technique » dans le fonctionnement émotionnel et psychologique du client est plus grave qu’il n’y paraissait à première vue.
Ne restez pas seul avec lé difficulté, vous gagnerez un temps précieux en prenant une ou deux bonnes séances de supervision sur ce cas spécifique. Tarifs de supervision de coachs.
FAQ - Coaching et Légitimité dans le Management
Réponses aux questions fréquentes sur la légitimité et la gestion de conflits en contexte managérial
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Pourquoi le manager ne doit-il pas se laisser distraire par les contestations de sa légitimité ?
Se focaliser sur une personne qui conteste sa légitimité détourne l’attention des priorités essentielles, telles que la cohésion d’équipe et le développement des collaborateurs. En concentrant son énergie sur des actions constructives, le manager renforce la performance collective.
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Comment le coaching aide-t-il à prendre du recul face aux critiques ?
Le coach incite le manager à se questionner sur l’origine des sollicitations. Par exemple, en demandant « De quelle priorité est-ce que cette personne vous détourne ? », il permet au manager de rediriger son attention vers ce qui crée réellement de la valeur.
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Quels bénéfices tire le manager d’une posture moins affective dans le recadrage ?
Adopter une approche moins personnelle permet de désamorcer le jeu de contestation. Le manager peut alors recadrer de manière plus objective, en orientant la discussion vers des solutions, tout en conservant un contact chaleureux mais ferme qui favorise un climat de confiance.
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Pourquoi éviter d’analyser en profondeur ce qui ne va pas lors d’un conflit ?
Analyser sans cesse les problèmes peut renforcer le cycle de contestation et attirer l’attention sur les aspects négatifs. En évitant de se concentrer sur ce qui cloche, le manager évite de tomber dans le piège de l’impuissance et garde le focus sur les actions concrètes qui font progresser l’équipe.
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Quel rôle joue la notion de 'légitimité' dans les interactions entre managers et collaborateurs ?
La légitimité est souvent abordée comme un jeu de regards et d’attention. Plutôt que de se laisser affecter par des contestations, il est profitable de voir ces situations comme une opportunité pour renforcer sa confiance et réévaluer ses priorités managériales, en se concentrant sur la construction d’une dynamique d’équipe orientée vers les solutions.