Comment Travailler avec la peur en coaching ? C’est le thème sous-jacent de nombreuses séances de coaching. Mises en garde et exposé d’une technique de coaching. Si vous êtes profondément réceptif à vos clients, il leur arrivera naturellement de vous faire part de leurs émotions. Et c’est parfois embarrassant si on ne sait pas quoi faire avec. Il vous faut bien pourtant travailler avec la peur du client, sa colère, sa tristesse, parce que ce sont les leviers profonds de son changement…
Dissocier pour élucider et unifier
Si éventuellement, vous êtes mal à l’aise avec les émotions du client, c’est parce qu’elles vous mettent en relation avec vos propres émotions, qui vous mettent mal à l’aise, parce qu’elles ne sont pas suffisamment reconnues et assumées. Et pour être honnête avec vous-même (et la profession de coach) et vos clients, vous devez vous engager dans un travail personnel d’élucidation des phénomènes émotionnels de votre monde intérieur. (On peut travailler cela en supervision, si l’expérience vous tente…)
Cependant, quand vous êtes à peu près au clair avec vous-même, comment faire avec les émotions de vos clients ? Nous allons vous proposer une méthode d’accompagnement, qui vous aidera à coacher vos clients qui veulent explorer leur profondeur, pour se libérer d’émotions douloureuses et récalcitrantes. Parmi les émotions, se trouve la peur.
Dans cet article, et pour vous donner un exemple, nous allons aborder une manière de coacher un client en proie à une peur.
Comment travailler avec la peur ?
Pour voir comment travailler avec la peur, nous allons en choisir une « simple » (sachant qu’aucune ne l’est vraiment : elles sont toujours reliées entre elles et rattachées à l’une des branches des 3 fondamentales de la peur de la mort : peur de l’absurde, peur de l’isolement, peur de disparaître) ? Exemple classique : supposons que votre client veuille travailler avec la peur « de ne pas y arriver, de ne pas être à la hauteur devant des gens impressionnants »… Derrière cette peur, plus ou moins objective, il y a d’autres peurs, totalement décorellées de la situation présente et disproportionnées par rapport aux enjeux présents.
- « je vais être ridicule, ils vont se moquer de moi » – peur du ridicule et de l’absurde
- « ils vont me rejeter » ou « ils vont me laisser tomber » – peur de l’isolement
- « je vais perdre mon job », ou bien « je vais rater cette affaire » – peur de disparaître
Il va s’agir de décontaminer une situation objective de prise de parole en public de certains enjeux beaucoup plus profonds et parfaitement irrationnels.
En plus de travailler éventuellement à quelques trucs de prise de parole pour donner un peu confiance, il va donc surtout falloir agir à deux autres niveaux, qui intéressent le coaching de niveau 2 (les techniques de prise de parole relevant plus d’une formation sur mesure ou d’un coaching/training) :
- au niveau rationnel, en prenant conscience du mécanisme émotionnel
- au niveau irrationnel, en « pactisant » avec les émotions, pour travailler avec la peur…
Les deux niveaux sont complémentaires et indispensables. Le simple fait de comprendre un mécanisme ne suffit pas à totalement débrancher son processus. Savoir qu’il y a un virus dans votre ordinateur, savoir lequel, repérer ses effets, en comprendre les causes, ne vous prémunit pas de lui.
Mais c’est le minimum requis pour pouvoir intervenir. Il en va de même avec votre propre corps : savoir que vous êtes grippé, ou savoir ce que c’est que la grippe, ne vous guérit pas (mais les antibiotiques non plus d’ailleurs :-). Ce qui guérit votre corps, c’est votre corps lui-même, si vous le laissez se reposer.
Mais ça va plus vite, si vous accompagnez, en étant conscient de ce qui se passe à l’intérieur au lieu de vous distraire ou de vous agiter.
Technique pour travailler avec la peur
Expliquer qu’on va examiner ensemble les différents aspects vécus de la situation, en explorant 4 points de vue complémentaires :
- Les émotions du client, et les fantasmes enfantins qui sont derrière (qui leur donnent leur force terrifiante)
- La démarche protectrice, consistant à vouloir se dégager de l’emprise des émotions inhibantes ou débordantes
- Les ressources à disposition
- L’approche du coach intérieur
Comme dans la technique des mentors, vous pourrez suggérer à votre client de faire parler tour à tour les différentes parties de lui-même, puis d’en faire une synthèse… En dissociant les différents aspects d’un vécu intérieur, c’est comme si on démêlait un paquet de noeuds.
Après, on y voit plus clair et on retrouve un plus grande liberté intérieure. Il convient donc de dissocier, pour pouvoir mettre de l’ordre, prendre en compte, réparer, et ce faisant : réunifier !
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En savoir plusOsons travailler avec la peur, mais soyons sérieux !
Etre Coach, ce n’est pas être un pompier pyromane. Quelle expérience avez-vous, vous-même, de votre propre monde intérieur ? Depuis combien de temps travaillez-vous sur vous-même, toute la journée ? Ne soyez pas comme une personne naïve, qui me disait récemment :
« Ah oui la méditation, je connais bien : j’en fais depuis un an ! »… Rendez-vous compte du ridicule de cette affirmation : un an ce n’est rien ! Et puis, là on ne parle pas de pratiquera conscience de soi 20 minutes deux fois par semaine ou même une fois par jour, on parle de travailler sur soi, en PERMANENCE.
Si possible depuis des années et des années, avant de se lancer en aveugle à accompagner des clients dans des expériences profondes. Savez-vous seulement ce que vous allez découvrir ensemble : des souffrances inimaginables, des terreurs, des peines, et des fureurs insoupçonnées.
Vous me direz : cela ne me touche pas, cela concerne le client ? Mais si vous êtes en relation de coaching véritable, vous allez ressentir ces émotions en vous ! Mais pas seulement les souffrances : aussi la liberté, la joie, l’amour, la paix. Ce n’est pas facile non plus. Etes-vous prêt ? Vous êtes sûr ? Coach c’est un métier (sans doute le vôtre), pas un porte clés ! Je ne souhaite pas vous faire croire que vous allez devenir des magiciens en un coup de baguette magique.
C’est donc volontairement, que je ne livre pas un protocole clé en mains, comme une recette de cuisine, afin que vous ne vous brûliez pas les doigts en apprentis sorciers. Je vous propose plutôt des principes et des éléments de pratique pour vous inspirer. Mais c’est à vous qu’il revient d’avoir du tact, de la mesure, de la sensibilité, et de la maturité pour accompagner, avec toute votre humanité…
1-Explorer le fantasme de l’enfant
Comment cela se joue pour chacun, quelle est la forme particulière de ce dynamisme de peur, quels mots sont employés, quelles émotions spécifiques sont ressenties, à quelles sensations dans le corps cela renvoie-t-il le client ? Après avoir pointé les émotions, et l’histoire fantasmée par l’enfant intérieur, demander surtout au client ce qui est ressenti dans son corps…
Option : Demander éventuellement si le client fait un lien avec un événement ou une situation de son passé, auquel cela se rattache ? (Conditions pour cela : quand on est en face à face, que la relation est suffisamment construite, et qu’on dispose de suffisamment de temps : au moins 1h30, et qu’on est dans un lieu qui permet un isolement suffisant)
2- Convoquer un protecteur
Remarques sur le choix du protecteur : pas forcément une maman ou un papa, si dans l’histoire du client, ces personnages historiques ne jouent pas ce rôle dans son monde intérieur… (parfois, les parents ont été des agresseurs pour vos clients). Ne partez pas du principe qu’un grand frère rassure ou qu’une grande sœur est une confidente qui console….
Dans le monde intérieur de ce client son frère est peut-être un « tyran dangereux », ou sa soeur une « chipie qui trahit ». L’histoire des autres est à l’infini différente de la vôtre. Ne préjugez donc de rien, soyez prudent, ayez du tact…
- « Vous avez des frères et sœurs ? Y en a-t-il un/une (ou un/une ami-e) qui vous aimait beaucoup auprès de qui vous vous sentiez en sécurité, qui vous aurait même parfois défendu ?
- « Au besoin, pourriez-vous en inventer un/une, qui serait « meilleur (e) » que celui ou celle qui a existé, pour vous réconforter maintenant ?
Si personne n’a représenté un protecteur satisfaisant dans l’enfance de ce client, recourez aux mythes, aux personnages de cinéma ou de contes de fées : Le bon génie de la lampe d’Aladin, Bagghera du livre de la jungle…
Orientez votre client vers un héros assez « vaste ». Pas juste un guerrier qui soit fort, mais un personnage qui fasse également preuve de bonté et d’intelligence, ce sera moins caricatural et mobilisera plus de ressources chez votre client.
- Ce protecteur que vous imaginez : que vous dirait-il, pour vous donner du courage ? Entendez maintenant ce qu’il vous dit… qu’est-ce que cela provoque en vous ? Que ressentez-vous dans votre corps, maintenant ? Qu’allez-vous faire de différent, fort de ce nouvel état intérieur ? (évidemment, là, je raccourcis une séance d’1 heure en trois phrases, vous l’aurez bien compris. Il faut laisser le temps au client, de ressentir.. Et parfois il a du mal, il ne ressent pas, il peut même trouver cela très étrange, il n’est pas forcément à l’aise tout de suite avec cette approche. Ce n’est pas grave. C’est pour cela que vous travaillez avec la peur en position basse, en lui laissant la main sur le pilotage de sa séance. Mais rappelons tout de même que c’est le client qui a choisi de vous solliciter, de travailler avec la peur dans cette séance, et qui a accepté votre proposition de faire comme ça aujourd’hui… donc soyez confiant. Mais on peut aussi rappeler au client qu’on peut arrêter ou changer à tout moment, s’il ne se sent pas bien.)
- « Si vous étiez, vous-même adulte, devant un enfant apeuré, qui ressent ce que vous venez de décrire ressentir au fond de vous, qu’auriez-vous envie de faire pour le rassurer ? Comment aimeriez-vous le réconforter ? Comment s’y prendrait votre « protecteur », cette voix intérieure protectrice ? Que dit-elle maintenant si vous la laissez s’exprimer ? Et quand vous prenez cet enfant dans vos bras, que ressent-il ? Et vous-même, maintenant, que ressentez-vous ? Etc… »
3 -Solliciter le coach intérieur du client
En sollicitant le coach intérieur du client, vous allez l’aider à intégrer ce qui s’est passé entre son enfant intérieur et son protecteur intérieur. Vous demanderez au client ce que son coach intérieur lui propose comme question pour travailler avec la peur qu’il évoque. Demandez-lui ensuite s’il veut réfléchir aux réponses que ces questions éveillent en lui.
Et ainsi, faîtes autant d’allers et retours que nécessaire, pour que le client intègre son expérience.
Comment savoir quand s’arrêter ? Vous n’avez pas besoin de le savoir, vous le demanderez au client : « Y a-t-il d’autres questions que votre coach aimerait vous proposer ? Souhaitez-vous encore bénéficier d’autres questions de la part de votre coach intérieur ? Que peut-il vous offrir d’autre que des questions ? Etc…
Et maintenant, comment vous sentez-vous ? Qu’est-ce qu’il serait utile de faire, à ce stade de votre séance ? De quoi avez-vous envie/besoin maintenant ? »
Votre posture induit celle du client
Différentes postures que vous prendrez en séance, vis-à-vis de votre client, vont l’aider à modéliser la posture que pourrait prendre son propre coach intérieur :
- Accueillez : Empathie, chaleur, cœur ouvert, accueil généreux,
- Dédramatisez : souriez et détendez en relativisant, associez-vous personnellement, dîtes que vous comprenez, dîtes ce que vous ressentez maintenant face au client, ou même comment ça résonne pour vous dans votre propre histoire…
- Permettez : prêtez vos mots pour faciliter l’expression, reformulez, montrez le mécanisme, donnez des exemples,
- « parfois ce que ressentent les enfants dans cette situation, ressemble à quelque chose comme… »,
- « je me demandais si cet(te) enfant ne serait pas en train de ressentir ceci… «
- » qu’en est-il pour vous, depuis l’intérieur, maintenant ? »,
- etc…
- Expliquez les transitions de la séance, adressez-vous à l’adulte en lui montrant le processus que vous proposez, en le lui expliquant, pour le mettre à l’aise et lui donner les clés et le responsabiliser, créez ainsi de l’alliance et de la confiance
- Reconnaissez avec le client qu’il y a plusieurs personnages qui s’expriment, et que ce n’est pas du « psychisme », une sorte d’abstraction (un peu comme une illusion). Considérez au contraire que ces voix intérieures, ces personnes de la personnalité, ont une consistance, et même une certaine autonomie (à l’évidence : sinon, le client n’aurait pas si peur… Ce n’est pas cet adulte qui a peur, c’est une partie de sa personnalité, qui est très enfantine, et qui détient une grande puissance. Il vaut mieux le reconnaître que de chercher à le minimiser…)
Questions à propos de travailler avec la peur…
Qui sont ces « démons » intérieurs qui éprouvent de si grandes émotions, qui craignent pour leur intégrité et même leur vie, dans des situations aussi bénignes du quotidien (comme de négocier une augmentation ou de prendre la parole en public) ?
D’un autre côté, que sont ces voix de personnages ressources que l’on convoque ?
- est-ce juste des aspects du psychisme ?
- est-ce de la folie, une forme de schizophrénie ?
- est-ce dangereux de les mobiliser ?
Certes, c’est délicat. Ceux qui ont peur de tout, vous diront qu’il faut être psy, ou chamane ou maître spirituel (ou que sais-je d’autre de folklorique ?) pour oser accompagner les autres, et travailler avec la peur en coaching…
- Certes, il faut une vocation, de la formation, de l’expérience, du feeling et de l’intuition, des méthodes… et de la supervision même !
- Mais il faut surtout avoir un corps pour être présent dedans, un coeur pour vibrer et une tête pour réfléchir. Cela s’appelle « être humain » !
Alors au diable les étiquettes, et si vous êtes coach : osez être vous-même et ouvrez vous à ce qui vient à vous, au lieu d’avoir peur vous-même de votre ombre et de vous réfugier derrière des paravents pseudo méthodologiques. Qui a inventé les méthodes, qui vous rassurent, et les diplômes universitaires qui attestent de leur connaissance intellectuelle ? Des gens comme vous, c’est tout.
Et il a bien fallu qu’ils commencent un jour à pratiquer et à donner leur confiance. Faîtes en autant et vous serez finalement plus proche d’eux (s’ils ont eux -même une expérience de ce dont ils parlent) qu’en lisant leurs écrits savants 🙂
Mais si vous lisez ces lignes, c’est que vous êtes appelé à travailler avec ces matériaux, pour vous-même d’abord, pour vos client ensuite, plus tard peut-être. Personnellement, je ne prétends pas être un expert théoricien, mais juste un praticien :
- normalement doué et complètement engagé dans son travail personnel et professionnel,
- n’ayant pas tellement froid aux yeux, je le reconnais, et comptant un bon nombre d’heures de vol à son actif.
Alors ne comptez pas sur moi pour écrire une théorie sur tout ça, et en faire une « secte » de plus. Je partage avec vous, mes confrères, des réflexions issues de ma pratique. Vous en ferez ce que bon vous semble, vous êtes responsable de vous-même, c’est évident. Pour ma part, je ne vous incite pas à vous lancer à faire n’importe quoi, je vous propose de regarder pour vous-même d’abord, comment cette technique résonne, comment elle vous interpelle peut-être.
Et après, qu’est-ce qui vous empêche de vous former, de vous muscler, de vous spécialiser, voire de solliciter une supervision sur ce genre d’approche exploratoire de vous-même ?