L’appel aux mentors est une technique de coaching professionnel, (probablement inspirée d’un protocole de PNL.
Je l’ai apprise auprès de jan Ardui il y a 10 ans, qui est très versé dans la PNL… (ce qui n’est pas du tout mon cas). Elle permet de mobiliser les ressources d’un client en vue de dépasser un obstacle. Dans cet article nous allons donner deux versions de cette technique de coaching professionnel :
- l’appel aux mentors intérieurs, qui donnent des conseils et des recommandations
- l’appel au coach intérieur, (« inner coach » comme disent les américains), qui propose des questions qui font prendre du recul
Technique de coaching professionnel : l’appel aux mentors
Demander au client de penser à une liste d’une dizaine de personnages qu’il admire (héros de cinéma, de bande dessinée, de mythologie, personnage illustre de l’histoire, artiste, homme politique, conquérant, membre influent de sa famille, ou de sa carrière, etc…). L’idée est de choisir dans son univers intérieur des personnages symboliques, qui détiennent peut-être une part de la solution que le client recherche en lui-même.
Ce peuvent être : Tarzan, Ulysse, James Bond, Steve Jobs, Gandhi, Léonard de Vinci, Sainte Bernadette, Tante Odette, un précédent boss,… Mais on peut également recourir à :
- des entités de la nature : l’Océan pacifique, la forêt amazonienne, le désert, une source, une cascade, l’Himalaya, etc…
- ou des entités mythiques : un Dragon, la reine des Elfes, Gandalf le blanc, le bon génie de la lampe d’Aladin, etc…
Parmi eux en choisir 3 dont il aimerait solliciter un conseil en rapport avec la décision qu’il doit prendre ou le défi qu’il doit relever. D’abord, il va décrire ce qu’il admire chez ces personnages, ce qu’il aime, les qualités qu’il leur reconnaît et l’histoire singulière et personnelle qu’il a avec eux. (On peut aussi procéder de la façon suivante : lister les qualités que l’on veut mobiliser en soi ou acquérir, et choisir des personnages qui les incarnent le mieux.) Ensuite, il va les représenter par un symbole qu’il va dessiner sur une feuille ou choisir sur internet une image à imprimer pour les représenter.
Mode opératoire de cette technique de coaching professionnel
Proposer au client d’écrire une question ou une demande à adresser aux 3 mentors…
Positionnant dans la pièce les papiers sur lesquels sont représentés chacun des 3 mentors, le client ira tour à tour se positionner sur ces supports (par exemple 3 photos, à côté des quelles il se tiendra successivement. Ce peut-être tout simplement 3 chaises disposées dans la salle à la fantaisie du client, sur les quelles on posera la photo ou le nom du mentor).
Inviter le client à se sentir comme le personnage, à se représenter les qualités intrinsèques de ce personnage, puis de faire parler ce personnage répondant à la question ou la demande formulée par le client.
Le coach pourra ainsi dire : « Cher… Mister Bean, vous qui avez été choisi par … (mon client)… pour lui inspirer le sens de l’humour et de la dérision, je vais vous lire la demande qu’il vous adresse et vous prie de bien vouloir lui répondre quelque chose qui lui soit utile en rapport à la situation… et l’objectif de… ».
Ensuite le client, incarnant Mister Bean (en supposant qu’il fasse partie des 3 mentors choisis cette fois-ci par le client), donnera des éléments de réponse, sous forme de conseils, de dictons à méditer, de métaphore, etc… Le coach n’aura qu’à interroger le mentor et dialoguer avec lui selon sa créativité, au service de l’intérêt du client, qui l’a en quelque sorte mandaté pour mener cette requête pour son compte, tandis qu’il répondra lui-même à la place des mentors…
Si vous sentez que le client entre bien dans le jeu et la peau du mentor, vous pouvez lui demander de choisir un cadeau qu’il aimerait pouvoir faire à votre client (et demandez-lui de le décrire, de le visualiser pour le transmettre mentalement au client). Si votre client se prête à l’exercice, vous pourriez même demander au mentor s’il voit autour de lui quelqu’un d’autre qui aimerait prendre la parole pour compléter le conseil donné au client.
Attention, si vous tombez sur un client sensible et intuitif, vous serez peut-être surpris des réponses, mais ne vous étonnez de rien. Restez calme, disponible, confiant, sans jugement. Contentez-vous d’accompagner.
Si vous avez un doute, soumettez-le au client, demander lui s’il souhaite se reposer, aller plus loin, s’asseoir un instant, boire un peu d’eau, revenir à sa position initiale avec vous quelques instants, etc… Ne forcez rien.
Après avoir suffisamment consulté l’oracle d’un mentor, invitez le client à revenir à vos côtés, pour analyser ensemble les éléments de réponse et voir comment les mettre en oeuvre. « Qu’est-ce que cela vous inspire ? », » Et si vous aspiriez la qualité dont vous avez besoin de vous imprégner en même temps que vous laissez infuser ce conseil, comment vous sentiriez-vous, maintenant ? »…
Laissez au client le temps d’entrer dans l’expérience, de ressentir, de vibrer, d’incarner le conseil, d’intégrer la qualité…
Conditions de réussite de cette technique de coaching professionnel
Expliquer dès le départ au client que c’est une mise en scène, un jeu d’enfant en quelque sorte auquel il peut se livrer, qui va lui faire toucher consciemment des messages inconscients dont il a besoin…
Accompagner le client avec amitié, respect et tact, comme d’habitude, mais avec encore plus de délicatesse, car le client est peut-être dans un état de conscience un peu décalé. Il vous a offert sa confiance et s’adonnant à cet exercice qui l’entraîne peut-être là où il ne s’imaginait pas qu’il serait emporté…
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En savoir plusPoints de vigilance pour réussir cette technique de coaching
Soyez très attentif, notez mots qu’emploie le client quand il fait parler ses mentors, reformulez-les avec précision, exprimez-vous chaleureusement, avec beaucoup de bienveillance. Soyez aussi respectueux et concentré quand vous interviewez les mentors pour le compte du client…
En fait, avec de tels protocoles, on n’est pas loin de certains rituels traditionnels. Oserais-je vous proposer d’y entrer avec humilité et avec le sens du sacré ?
Pour bien réussir un coaching, il est également très utile de maîtriser l’art du feed-back positif :
Offrir un feeb-back généreux assorti d’un recadrage
1- Vous accueillez : Non seulement l’autre, avec ce qu’il vit mais aussi la situation de coaching telle qu’elle est (n’avance pas), et ce qui émerge en vous de l’intérieur :
- « il m’agace »,
- ou bien « je le plains »,
- ou encore « je n’y arrive pas, je me sens nul »,
- « j’espère qu’il ne va pas se rendre compte que je suis perdu moi aussi, et impuissant à l’aider… »,
- etc…
2- Vous écoutez : le discours du client et la manière dont il est partagé (imposé, plaqué, suggéré, feint, pleuré, crié, mis en scène, induit, etc…), ainsi que l’impact sur vous, et les liens avec ce qui se passe par ailleurs dans l’environnement extérieur autour de vous : les bruits dans le couloir, qui vous empêchent de bien vous concentrer, le chauffage ou la climatisation en panne qui fait que vous avez froid ou trop chaud, la chaise où vous vous sentez bien ou au contraire mal assis, etc…
Tout interagit avec tout. Et vous captez toute cette constellation d’éléments éparses, dont la perception consciente des liens entre eux vous donne parfois des pistes d’inspiration.
Exemple : « je sens que c’est très froid entre nous…et justement le radiateur ne marche pas » Est-ce à cause de la température extérieur que vous ressentez le froid intérieur ou bien est-ce simplement la présence simultanée de deux éléments convergents en synchronicité ?…)
3 – Vous proposez un feed-back généreux sur le contenu de ce qu’a partagé le client avec vous. Et juste après, depuis une position basse, vous proposerez un autre feed-back, mais sur sur le processus de la séance cette fois.
- Je suggère de commencer par une reformulation positive, sincère et chaleureuse, de ce que vous entendez de la situation du client.
- Exemple : « J’entends que vous traversez une situation difficile à plusieurs égards… (et vous listez lesquels. Ne restez pas général, soyez précis et spécifique. Cela va vous demander un haut niveau d’exigence envers vous-même, cela suppose que vous mobilisiez vos ressources intensément, à concurrence de ce que votre client est dans l’embarras. C’est cela être professionnel et performant à cet instant-là…). J’ai bien entendu que plusieurs facteurs sont selon vous la cause de cette situation (vous énumérez ce que vous avez entendu, si possible sans vous laisser interrompre, sinon le client reprend sa litanie) et que vous souffrez de plusieurs sortes de conséquences désagréables à cause de cela (et vous les reformulez). J’entends aussi combien c’est douloureux pour vous (inquiétant, frustrant, incompréhensible, injuste… ne vous trompez pas de mot. Si vous avez un doute, dîtes-le « je ne sais pas si c’est le mot juste, vous me le confirmerez tout à l’heure si vous le souhaitez, mais j’ai cru sentir que… »).
- Ensuite vous allez accueillir « brièvement » l’accusé réception que le client ne manquera pas de vous proposer, mais vous aurez soin de garder la main, pour ne pas le laisser s’emparer de l’espace, que vous lui avez généreusement offert jusqu’ici.
- Vous direz par exemple : « Je vous remercie de cette validation (ou de ce complément). Puis-je me permettre maintenant de poursuivre le feed-back que je vous propose ? J’en ai besoin pour faire une sorte de point d’avancement intermédiaire avec vous dans votre séance… »
- Et là vous proposerez une reformulation des grandes phases de la dynamique de la séance : « Tout d’abord, vous avez évoqué votre contrariété de… et votre désir de…. Puis vous avez indiqué que vous n’aperceviez pas de solution satisfaisante, ce qui vous a amené à raconter que… et vous a fait éprouver cette émotion de… que nous avons citée à l’instant. Et puis vous êtes revenu à votre contrariété, qui semblait renforcée d’autant, et vous avez réévoqué l’impasse dans laquelle vous vous trouvez, sans solution etc… Cette boucle de : « contrariété-pas de solution-émotion de renforcement- et de nouveau pas de solution », vous l’avez effectuée plusieurs fois, et de différentes façons.. »
- Evidemment cela demande d’avoir été attentif à la fois à tout ce que vous avez accueilli et écouté, et aussi à la dynamique de la séance, c’est-à-dire au processus de pensée du client… cela demande un peu d’entraînement pour le faire avec aisance. Mais si vous n’y parvenez pas encore à la perfection, ne soyez pas comme un écolier qui se concentre pour réussir, soyez plutôt comme un élève doué mais rebelle, qui se fait confiance et qui reste cool au coeur de l’examen…
- « Maintenant, je vous propose de sortir de cette boucle, en y incluant une autre dimension ou une autre question : voulez-vous s’il vous plaît indiquer quelle situation serait meilleure pour vous ? Je ne vous propose pas encore de chercher des solutions, car j’ai bien entendu que vous n’en voyez pas, mais je vous invite juste à une formulation positive de ce que devrait être la situation, si elle était plus satisfaisante pour vous. Ce sera l’occasion peut-être de repérer des objectifs que vous aimeriez vous donner pour aller de l’avant et en sortir. C’est bien ce que vous désirez, n’est-ce pas ? J’ai bien entendu que vous souhaitiez améliorer les choses, vous-même, et cesser d’attendre que cela s’arrange tout seul ? Vous m’avez même dit que tourner en rond faisait également partie des aspects douloureux de cette situation…Voulez-vous sortir de cette boucle, maintenant, avec moi ? »
De cette manière, avec une reformulation qui valide le contenu, un feed-back sur le processus qui dépose le cercle vicieux, et une proposition qui introduit un nouveau paramètre, vous ouvrez une fenêtre sur le positif, vous ouvrez à la possibilité d’un insight.
Recadrage du client
Il y a des chances que le client accède à votre invitation, mais ne sache pas bien comment y répondre. Vous devrez l’aider. Il tentera peut-être de revenir à sa boucle, « dénoncée » précédemment. Et là, vous devrez ne pas lâcher la barre, et veiller à bien terminer le geste :
- « Ah ? Là il me semble que vous retournez à vos « premiers amours » en me racontant encore ce que vous m’avez déjà dit tout à l’heure… Voulez vous que nous restions bien concentrés sur le formulation positive de… ? »,
- « Puis-je vous suggérer de rester provisoirement focalisé sur cette formulation positive ? J’ai commencé à repéré quelques éléments que je vais vous reformuler tout-l’heure qui vont nous permettre d’avancer… Mais pour le moment, voulez-vous évoquer aussi cet autre aspect dont vous me parliez également… pour compléter la formulation positive de la situation cible que vous aimeriez vivre, en lieu et place de celle-ci qui ne vous convient pas ?
- » En quoi est-ce un recadrage ? Vous avez rappelé le cadre et recentré le client à la fois par rapport à ses objectifs et à votre proposition de formulation positive de la situation. Vous avez mis en évidence la façon dont le client choisit (involontairement) de se laisser enfermer et suggéré qu’il pouvait faire un autre choix avec votre aide. Cela ouvre une autre perspective. C’est bien cela un recadrage, non ? Vous éclairez la situation depuis un autre angle, qui offre un autre point de vue, qui cadre l’image autrement…
- De cette formulation positive de la situation cible, vous déduirez avec le client des objectifs pour la suite du coaching : « Donc vous souhaitez trouver des solutions pour que…. et ces solutions devront intégrer telle et telle contrainte pour que… Par quel élément de cette solution globale, souhaitez-vous commencer ? »
- ou bien : « Voulez-vous que nous décomposions maintenant ensemble cette situation cible, en situations intermédiaires qui déjà seraient plus avantageuses que la situation actuelle, et qui représenteraient autant de petites étapes que vous pourriez chercher à atteindre avec des solutions plus petites et plus faciles à envisager ? »
Intervention puissante et coaching niveau 2
L’enchaînement de ces gestes techniques représente une intervention puissante, qui sort le client de son sillon mental et l’aide à changer de perspective.
Toutefois, si cette démarche devait échouer, il serait alors nécessaire de proposer un autre niveau de recadrage : » je comprends que ce soit difficile pour vous actuellement de vous décoller de ce que vous ressentez pour envisager des solutions. Dans ce cas, nous ne pouvons pas avancer non plus dans cette séance. Voulez-vous que nous évoquions plutôt un autre objectif pour aujourd’hui ? »
Mais il y a des chances que la même forme se reproduise dans le travail de ce nouvel objectif, et débouche sur le même résultat.
Vous pourriez alors plutôt tenter : « Voulez-vous que nous revenions sur cette situation une prochaine fois, quand vous aurez un peu décanté les premiers effets de cette séance-ci ? Je vous propose dans ce cas de réfléchir de votre côté à des pistes de solutions, les plus petites choses (même insignifiantes) que vous pourriez faire, et qui introduiraient même un tout petit changement dans la situation… » (et là il y a des chances pour que le client, vous sentant vous retirer, vous propose tout de suite des petits pas positifs, pour montrer sa bonne volonté ou tout simplement parce que votre retrait le décolle de l’espace problème et votre proposition de petits changements dérisoires lui donne une permission de trouver des petites choses…).
Changer de niveau logique
Ce recadrage sur un autre niveau logique que le précédent, aura dans ce cas permis ce que le premier n’avait pas suffi à obtenir. Après, il y a bien sûr le recours ultime, consistant à interrompre le coaching, indiquant que vous n’êtes peut-être pas la bonne personne pour accompagner ce client, ou reconnaissant qu’il n’y a en effet peut-être pas de solution possible pour lui actuellement, tel qu’il pose le cadre de son objectif… (et là encore, il restera pour le client une porte de sortie qu’il peut prendre, en refusant d’interrompre, mais cette fois-ci en intégrant vos conditions !
A moins qu’il n’en profite pour se dégager de ce coaching qu’il vit peut-être comme une emprise. Dans ce cas, vous aurez appris et gagné beaucoup en libérant ce client de cette emprise, car d’une certaine manière, c’est une façon de se prendre en charge et d’agir positivement sur son environnement que de décider de se libérer d’une contrainte.
Vous ne manquerez pas de le lui faire remarquer, l’invitant à ne pas s’arrêter en si bon chemin et à continuer à faire le ménage dans ce qui l’encombre 🙂 Etre coach jusqu’au bout, c’est parfois accepter de ne pas toujours plaire à vos clients.